Proposition pour un apprentissage FLE différent 2021-02-25T11:28:23+01:00

Proposition pour un apprentissage FLE différent

Préambule Pédagogique :
L’enseignement FLE n’est plus celui des années 1970-1980. C’est un fait. Cet enseignement doit s’adapter.
Voici nos propositions.

Pourquoi « différent » ?

  • Parce que le public qui est le vôtre (le nôtre) n’est plus celui des années 1980. De plus, ce public n’a plus du tout la même approche de la langue ni les mêmes ambitions linguistiques et/ou culturelles ;
  • Parce que nous allons nous appuyer sur une analyse de la langue (le plurisystème de Nina Catach). Analyse qui va à la fois simplifier et éclairer votre (notre) apprentissage.

Ce qui va vous être proposé ne changera en rien votre pratique journalière avec vos Apprentis. Soyez rassuré ! Elle changera juste votre « regard » sur cet apprentissage. Il l’éclairera, à mon sens, d’un jour nouveau qui vous portera plus loin.
Choisissez d’être attentif à un ou deux des « regards » proposés, voire même trois ou quatre et je suis persuadé que votre « vision » de l’apprentissage sera différente. Plus ouverte, plus efficace.
C’est bien un « regard » neuf que je vous propose pour 2019-2020. Seulement cela et pas autre chose de plus.

Ensuite, toujours avec votre accord, je vous proposerai de réunir nos expériences pour définir une nouvelle pédagogie FLE pour 2020-2021 au sein du CSAM de Villepinte.
Peut-être, par la suite, pourrons-nous partager cette expérience avec d’autres CS…
Voici ces nouveaux « regards » (traités un à un, pour plus de clarté) que vous devez avoir dans vos cours l’année prochaine.

Ce REGARD sur une nouvelle logique d’apprentissage FLE… C’est simplement l’addition intelligente de tous ces « mini-regards ».
Je n’ai pas choisi un ordre de priorité particulier, mais tous ces « regards » sont importants. Vous choisirez, vous, en fonction du niveau de vos élèves, des circonstances et de ce qui vous intéresse à ce moment là… le ou les « mini regards » de votre choix.

1. Nouveau regard sur un nouveau « cheminement de l’apprentissage en général :

  1. D’abord et toujours, l’ORAL (la compréhension) ;
  2. Sans oublier de travailler sur le spatio-temporel, la latéralisation. Savoir ce qui est à gauche ou à droite, dessus ou dessous, devant ou derrière, en haut ou en bas, au début ou au milieu ou à la fin est important dans le repérage (dans un texte) d’une syllabe ou d’un mot ;
  3. Ensuite, la LECTURE (des lettres aux mots avec une différenciation SON/SENS) ;
  4. Puis, seulement après, et en dernier, l’ÉCRITURE (avec l’accentuation de la compréhension SON/SENS, la maîtrise des 1000 Mots De Base pour, enfin, aboutir à l’écriture autonome dans le cadre d’une activité motivante).

Depuis la nuit des temps c’est toujours le même cheminement, quels que soient le lieu et la langue que l’on apprend.

Les étapes peuvent s’échelonner sur une ou plusieurs années et pour certains ne pas être aussi marquées que pour d’autres.

Bien sûr, on peut travailler l’oral et la lecture ou la lecture et l’écriture en même temps. Le cloisonnement des parties n’est pas une obligation… il dépend beaucoup des circonstances et des Apprenants. Mais pratiquer l’acquisition de l’oral de base et de l’écriture (faire des phrases écrites) en même temps… me paraît peu souhaitable et peu efficace ;

2. Nouveau regard sur la pédagogie à appliquer (c’est ce regard qui intéresse le plus Yasmina) :
Une pédagogie « active » d’ouverture et de tolérance orthographique. Les neurosciences nous interpellent sur l’importance de la bienveillance. Soyons donc bienveillants. L’Apprenti ne fait pas des « fautes » (terme à proscrire…) juste des erreurs qu’il faut corriger en prenant soin de n’en choisir qu’une ou deux par séance. Pas plus.
Et surtout, savoir SORTIR DU LIVRE le plus souvent possible (au moins de temps en temps) pour faire « quelque chose » d’actif et de différent. Cela me paraît bon et sain pour vous comme pour votre classe.
Par pédagogie active, j’entends aussi mettre les Apprenants dans de petites situations dont ils pourront se resservir dans la vie pratique.
Théâtraliser des situations comiques (ou non) lorsque l’occasion se présente me paraît très  intéressant* ;

*Pourquoi pas une petite formation ensemble avec l’association « Issue de secours » ? Comment mener à bien un petit sketch à partir d’une situation quelconque. Je participerai car moi aussi, dans ce< domaine, j’ai a apprendre.

3. Nouveau regard sur la lecture :

La lecture n’est en aucun cas un apprentissage global… les neurosciences l’ont prouvé définitivement. Notre cerveau est analytique, il étudie les petits éléments puis les associe et leur donne ensuite un sens.
Il faut donc passer des lettres aux syllabes simples, des syllabes complexes aux mots.
La seule méthode d’apprentissage est bien la méthode syllabique.
Le cap des lettres aux syllabes est une véritable étape en soi. Voir l’expérience de Marie-Françoise et Claude.
Ensuite passer des mots aux phrases simples puis des phrases simples aux phrases complexes.

Principe général :
Toujours aller du SIMPLE au COMPLEXE, de la généralité (donc en tenant compte de la fréquence) aux exceptions. Jamais le contraire.

4. Nouveau regard sur l’orthographe :

Contrôler que le Code phonéticographique est bien respecté. Ecrire « anfent » au lieu d’enfant, « farmaci » au lieu de pharmacie n’est pas très grave… ce ne sont que des mots à apprendre (à mettre dans son stock mémoriel) avec retour aux dictionnaires ou aux imagiers.
Rappelez-vous « Le français, c’est du chinois ! ». Soyez indulgent pour le doublement des consonnes, c’est un casse-tête pour tout le monde. Une seule règle, celle du e devant une consonne simple ou double et particulièrement avec le t et le l. Devant une consonne simple, il est accentué : je « pèle » ou je « pelle »… peu d’importance en soi mais pas « je pèlle ».
Des bijous avec un s au lieu d’un x… Pourquoi sanctionner ? C’était une des propositions des réformateurs de l’orthographe !
Tolérance sur les accents du fait du e non accentué qui s’entend [é] ou [è]. Particulièrement sur les majuscules où ils n’ont pas lieu d’être.
Par contre écrire « peti » ou « gran » en oubliant la Lettre Muette est une erreur plus importante car cette lettre représente du SENS ;

5. Nouveau regard sur la linguistique et l’analyse de la langue :

C’est le plurisystème de Nina Catach dont il ne faut retenir que la différenciation SON/SENS associée à la notion de Fréquence. La notion de Fréquence est plus qu’importante en FLE… mais j’y reviendrai plus loin.
Pour le SENS, Marques Des mots Variables ou MDMV (voir Syntaxe) et Mots Pièges ou MP. Différencier « à » d’as » ou « a » comme différencier « ce » de « se » ou « s’est » de « c’est » de « ces » ou de « ses » voire même de « sais » et « sait » À L’ÉCRIT est très important (voir Fréquence). Même chose pour « encre » et « ancre »…
Cela sans oublier d’écrire les Lettres Muettes ou LM qui représentent bien du SENS… C’est tout mais c’est fort important ;

6. Nouveau regard sur la syntaxe :

Restez-en aux phrases simples S-V-C1-C2 à la rigueur. Jouez plutôt sur le travail horizontal et vertical de la phrase… Sur le choix du verbe… Sur le choix de la Forme, du Temps, de la Voix ou du Mode du verbe. Jouez avec les synonymes.
Ce sera, à mon sens, plus judicieux et plus efficace pour les Apprenants qu’insister sur un accord difficile ;

7. Nouveau regard sur l’oral :
Parler, échanger, manipuler la langue est le point de départ de tout apprentissage FLE. Une sortie motivante et bien préparée est souvent meilleure qu’une leçon banale ;

8. Nouveau regard sur l’écriture :
L’écriture est importante (c’est de la compréhension) passer de l’écriture en grandes capitales aux minuscules est une grande étape : ce peut être même un but en soi pour certains.
Le passage suivant (le Graal…) est bien l’écriture manuscrite même si l’on oublie un peu les majuscules de cahier difficiles ;

9. Nouveau regard sur les dictionnaires et les listes de mots :

Savoir jouer avec les dictionnaires ou les imagiers au cours d’une séance pour fixer un mot. Des tas de jeux faciles existent (pendus, anagramme, etc.). Savoir s’arrêter sur un mot pour le comprendre, faire une phrase et l’écrire tout de suite animera votre cours et sollicitera intellectuellement vos élèves. Pour les dictionnaires, il faut choisir plutôt des albums et des abécédaires pour enfants. Ce sont les Mots De Base qui leur manquent.
Utiliser les listes de fréquences tirées des LOB de Nina Catach ou Listes orthographiques deBase. Jouer avec le jeu de la modernisation orthographique. Utiliser les jeux sur les racines grecques et latines… Voir le point 11 du document ;

10. Nouveau regard sur l’acquisition de l’oral :

À quoi bon apprendre à lire et à écrire à quelqu’un si celui-ci ne parle pas et ne comprend pas ce qu’on lui dit ?
C’est la partie majeure du cheminement et beaucoup de progrès dépendent de cette période incontournable pour moi. Tolérance sur la prononciation (et/ai… abstrait… oignon… etc.). Faites juste un retour « miroir »* quand cela est nécessaire ;

* Le retour « miroir » particulièrement à l’oral, évite de faire une leçon, de corriger de façon « professorale ». Surtout, il ne « dévalorise » pas l’apprenant et est TRÈS, très, efficace.

11. Nouveau regard sur le vocabulaire :

570 mots représentent les Mots De Base de la liste Henmon de 1931 et suffisent pour se comprendre. Apprenez d’abord ceux-là. Bien sûr ce n’est pas suffisant et un objectif de 1000 mots environ me paraît souhaitable. Consultez les listes et prévoyez de petites séances de vocabulaire très courtes.
Pour moi, c’est là un travail essentiel, car avec ces 1000 mots on peut écrire correctement en français… puisque ces 1000 mots représentent 60/65 % des apparitions dans tous les textes scolaires scientifiques ou littéraires. Nous revenons une fois de plus à la notion de Fréquence. Voir point 14.
Rappelez-vous : « Le français… c’est du chinois ! ». Mais bien sûr 1000 mots et même 5000 mots (le dictionnaire CP-CE) c’est mieux encore. Mais… ne rêvons pas trop ;

12. Nouveau regard sur la grammaire :

Simplifier la grammaire au maximun… Travailler les notions suivantes essentielles : article-nom-adjectif pour les accords ; sujet, verbes pour les désinences verbales ; compléments d’objet pour les Participes Passés ; compléments de lieu de temps pour l’écriture de phrase plus longues… c’est déjà beaucoup ! Comme base de grammaire prendre le « Livre de grammaire pour adultes immigrés » d’un collectif d’alphabétisation chez Maspéro. Copie possible. En aucun cas les livres actuels (nouveau Bled ou nouveau Bescherelle en trois volumes) inutilisables pédagogiquement, à mon avis ;

13. Nouveau regard sur la phonétique parfois indispensable :

Je vous propose une phonétique pédagogique ou APP qui correspond aux notions que l’Apprenti acquière avec vous. C’est donc redondant avec le CODE phonéticographique de Nina Catach (voir les archigraphèmes) ;

14. Nouveau regard sur la Fréquence :

C’est bien là qu’il faut garder l’œil ouvert. 500 mots suffisent pour apprendre à lire et à écrire. 24 verbes seulement sont importants et, bien sûr 70 Mots outils tout à fait indispensables et complémentaires des 500 ;

15. Nouveau regard sur vous-même :

Bienveillance et encouragements « à tous les étages ». Sans cesse et toujours. L’apprenant ne fait pas des fautes… Il fait juste des erreurs qu’il n’a pas encore comprises ou qu’on ne lui a pas correctement expliquées ;

16. Nouveau regard sur la compréhension et son fonctionnement :

De façon très simple, on comprend mieux ce que l’on pratique. Ce sont les neurosciences qui nous le disent. Pour comprendre « ouvrir », il faut ouvrir (la porte ou la boîte de conserve)… mais l’inverse est vrai, quand le cerveau entend « ouvrir », il refait le geste et comprend enfin clairement !

17. Nouveau regard sur la pédagogie à appliquer dans le cadre des élèves réels qui sont les nôtres. Comment devons-nous considérer notre rôle d’intervenant ?

Divers éléments viennent perturber ou accélérer les progrès de nos élèves. Il y a des éléments pratiques sur lesquels nous pouvons nous appuyer et d’autres, plus théoriques que nous maîtrisons moins.

Quels sont ces éléments ?

  1. Pour l’Apprenti (l’élève) : Bien discerner son envie (sa motivation personnelle) de son besoin pratique… Parler pour ne pas être seul ou passer l’A1 ou l’A2 pour travailler ?
  2. Consentir à apprendre par cœur (donc à travailler en dehors des cours) pour aller plus vite. Le cours ne suffit pas. Il ne suffira jamais ;
  3. Pour le Moniteur (l’Intervenant) : Pratiquer l’échange avec ses Apprentis. Converser, être à l’écoute de leurs demandes… Savoir sortir du livre ou du manuel qui rassure tout le monde. Manuel qui ne fait pas vraiment progresser les « bas niveaux » ;
  4. Ne pas oublier que l’Oral est le fondement de tout apprentissage linguistique : d’abord PARLER ! Puis COMPRENDRE le plus de mots possibles ;
  5. Ensuite, l’apprentissage de la Lecture (purement syllabique) ne devra pas être séparé de celui de l’Écriture car on écrit et on lit en même temps… Qui dit apprentissage de l’écriture dit apprentissage de l’Orthographe ;
  6. Pour finir, l’Apprenti devra augmenter son stock mémoriel s’il veut vraiment progresser : 570 mots suffisent. À raison de trois mots par jours, en un an… C’est presque 1500 mots qui peuvent être connus. Avec le vocabulaire de l’école, du tout les jours, du boulot et de la maison (de la famille). Mille-cinq-cents mots !
  7. C’est à partir de ce stock mémoriel que l’on peut écrire une phrase simple puis la travailler.

Ex. : homme/femme/enfant/grand/petit/être et avoir au présent… j’ai un enfant/je suis une femme/tu es grand/tu n’es pas petite.etc.

À partir d’une seule phrase on peut en travaillant dans l’axe horizontal et/ou vertical aller beaucoup plus loin en termes d’orthographe, de vocabulaire et de grammaire. C’est un protocole d’apprentissage. Vous êtes sorti du livre et votre cours devient un vrai cours vivant et adapté.

 18. Nouveau regard sur l’apprentissage de Lecture-Ecriture, avec utilisation de la Boîte d’apprentissage LLL composée de cinq jeux de cartes.

 Si je devais insister sur quelque chose… Ce serait le vocabulaire… Nos apprenants n’ont pas assez de vocabulaire… Nous devons veiller à cela en leur fournissant ce vocabulaire par tous les moyens possibles…Élargir nos séances avec des conversations, des jeux, des petites théâtralisations, des explorations verbales occasionnelles ou préparées…Comme les enfants, avant de lire et d’écrire (d’orthographier), ils doivent COMPRENDRE et PARLER.

Ce doit être notre « credo » d’enseignant FLE.

Documents proposés :

  • Liste des 570 (500 + 70) ;
  • Liste complémentaire perso ;
  • Liste des 24 VTF ;
  • Ecriture respectueuse du Code phonéticographique ;
  • API ;
  • Dicos adaptés ;
  • Analyse de la langue (dessin) ;
  • Plurisystème = château fort
  • Graphème/Phonème (dessin-Topo)
  • Mots Outils, etc.

François Vayssettes,
Instituteur.